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Benjamin Fayet | Le Récit d’une Victoire Mémorable

Benjamin Fayet pourrait parler de son incroyable aventure pendant des heures, mais il a tenu à nous en offrir un résumé aussi riche que captivant :  

Une première expérience marquante

Participer à un championnat du monde pour la première fois est une expérience unique, qu’il abordait avec une grosse appréhension. Malgré ses 90 heures de course accumulées dans d’autres compétitions, jamais il n’avait couru avec une telle intensité ni affronté une densité de niveau aussi élevée.  Les seuls moments de répit ont été les 2 heures 30 minutes de sommeil qu’ils se sont accordés. Leur stratégie consistait à creuser l’écart sur les treks, et cela a globalement porté ses fruits.  Cependant, les imprévus font partie intégrante de ce type de compétition :  « Sur la section packraft, nous avons perdu un de nos sacs contenant du matériel obligatoire, ce qui a eu pour conséquence de relancer la course, car en plus de la perte de temps pour le chercher, nous avons écopé d’une pénalité d’une heure. »  Malgré ce revers, l’équipe a su reprendre la tête sur le trek et repartir avec 10 minutes d’avance sur leurs poursuivants, juste avant une ultime section de VTT : un sprint impitoyable de 110 km avec 3 500 m de dénivelé positif.  Benjamin résume parfaitement l’intensité et l’émotion de cette aventure :   « Le meilleur souvenir du raid reste ce moment où j’ai vu Seb pleurer sur son vélo, sentant qu’on la tenait cette victoire. L’envie de gagner était tellement forte qu’il ne pouvait rien nous arriver. »  

La naissance d’une équipe gagnante  

Sébastien, Sandrine et Adrien, coéquipiers de longue date, courent ensemble sous la bannière 400 Team depuis plus de quinze ans. En 2023, l’équipe décide de participer à la coupe du monde au Canada, mais il leur manque un quatrième membre. Ils contactent alors l’association LOZÈRE SPORT NATURE, et Benjamin se porte naturellement volontaire.   La course s’étant tellement bien passée avec une victoire à la clé. Les membres de 400 Team décide d’intégrer Benjamin dans leur équipe pour la saison 2024. Ce choix s’ avéré payant puisque l’équipe remporte le Raid in France en juillet dernier, leur permettant de se qualifier pour ce championnat du monde en Équateur.  

Un objectif clair : viser le titre mondial

L’équipe ne s’en cache pas : après leur 2ᵉ place en 2023, et la désillusion de la disqualification, leur objectif était clair cette année : aller chercher le titre mondial. Le terrain montagneux, exigeant mais familier, leur donnait un avantage et renforçait leur confiance en leurs capacités. Pour Benjamin, c’était son tout premier championnat du monde, et l’appréhension était bien présente. Son entourage ne l’avait probablement jamais vu aussi stressé. Malgré cela, leur confiance en sa victoire a été une véritable source de soutien et de motivation tout au long de cette aventure.

Une cohésion et une communication essentielles 

Durant une compétition aussi longue et exigeante, la gestion de l’équipe et la communication sont cruciales : « Naturellement, nous prenons régulièrement soin chacun notre tour de demander aux coéquipiers comment ils se sentent. »  Si l’un d’eux rencontre une difficulté, les autres agissent immédiatement pour l’aider, par exemple en portant ses affaires pour alléger sa charge.  Le rythme est généralement imposé par Sébastien, leur capitaine, qui veille à maintenir une cadence élevée. Parallèlement, Adrien et Benjamin se partagent la responsabilité de l’orientation, discutant fréquemment des choix à faire et des éventuels doutes sur la progression.  Le dernier, et sans doute le plus important, aspect de leur gestion d’équipe concerne la stratégie de sommeil. En fonction de la fatigue de chacun, de l’évolution de la course et de la position des concurrents, ils décident ensemble des moments opportuns pour s’arrêter et dormir. Au total, ils ont dormi trois fois, pour un total de seulement 2 heures 30 minutes.  

Un moment critique : la perte du sac  

Durant cette compétition, l’équipe a fait preuve d’une grande homogénéité sur le plan physique, malgré quelques difficultés comme les jambes un peu lourdes d’Adrien lors des sections VTT. Cependant, aucune défaillance physique majeure n’est venue perturber le rythme, un point crucial pour maintenir une bonne dynamique collective. Un des moments les plus difficiles survient sur la partie packraft, en pleine nuit, lorsque Sandrine perd son sac étanche contenant du matériel obligatoire. Benjamin raconte :   « Nous cherchions désespérément un sac flottant sur une rivière avec nos faisceaux de frontale. Autrement dit, une mission impossible. »  

Sébastien, en capitaine expérimenté, prend la décision de ne pas insister et de continuer, pensant avoir un double de tout le matériel nécessaire dans les caisses. Mais quelques minutes plus tard, ils réalisent qu’il manquait également le matériel de cordes dans son sac. Là, la douche froide : une pénalité sévère était à prévoir, menaçant sérieusement leurs chances de décrocher le titre.

Ironie du sort, cet incident survient juste avant le CP26, un point de contrôle qu’ils avaient prévu de célébrer car en 2023, 400 Team avait été disqualifiée à cause d’une erreur similaire sur ce même CP26, alors qu’ils franchissaient la ligne en 2e position. La situation semblait donc d’autant plus amère. Pourtant, l’équipe décide de ne pas se laisser abattre et maintient un bon rythme. Une balise en aller-retour leur permet d’évaluer les écarts : ils avaient  environ 1 heure d’avance sur les 2e et 3e, ce qui leur remonte un peu de moral.

La chance leur sourit à nouveau. Lors de la transition, ils expliquent leur mésaventure à l’arbitre, qui semble comprendre leur situation. Il leur annonce qu’une équipe de trois, dont un équipier venait d’abandonner, arrive dans 30 minutes et pourra leur prêter son matériel de corde. Bien que l’arbitre les informe qu’ils écoperont d’une pénalité de 1 à 2 heures, cela ne les décourage pas. Ils repartent sur le VTT, plus motivés que jamais, prêts à continuer la course avec l’espoir d’aller chercher le titre.

La gestion de l’effort et de la fatigue : une stratégie bien maîtrisée

Dans ce type d’épreuve d’endurance, la gestion de l’effort et de la fatigue est primordiale pour rester performant sur la durée. L’équipe adopte une stratégie réfléchie dès le début de la course, basée sur les informations limitées données par l’organisation. Par expérience, ils tentent de déterminer les meilleures transitions pour dormir ou se reposer, tout en ajustant leur plan au fur et à mesure de la progression et des imprévus. « La règle de base, c’est de ne jamais s’arrêter et être le plus efficace possible sur les transitions. » L’efficacité sur les transitions est cruciale, car il est bien plus facile de ne pas perdre de temps que d’en regagner à l’effort physique. Le déroulement de la course offre aussi une alternance bénéfique entre les disciplines. Cette diversité sollicite des groupes musculaires différents, permettant une certaine récupération active. Comme le dit Benjamin, « On ne s’affole pas si on a les jambes très dures à la fin d’un trek de 70 km que l’on a fait « à bloc » pour faire des écarts, on sait qu’après 200 km de VTT, on aura retrouvé des sensations pour courir. »

En conclusion …

La victoire de Benjamin Fayet et de 400 Team au championnat du monde est le fruit d’une préparation rigoureuse, d’une cohésion d’équipe sans faille et d’une détermination sans limites parce que comme le rappelle  Benjamin : « Sans eux, on n’est rien. ». Un exploit mémorable qui restera gravé dans l’histoire de l’équipe et de chacun de ses membres.